Une première « preuve clinique » d’une plus grande résistance du paludisme aux traitements en Afrique a été apportée par des chercheurs, jeudi 15 avril. Leur étude, réalisée auprès d’enfants au Rwanda, établit un lien entre les mutations d’un gène du parasite Plasmodium falciparum, responsable de la maladie, et la persistance de ce parasite après trois jours de soins – un phénomène mis au jour pour la première fois en Asie du Sud-Est.
Transmis par les moustiques, le paludisme a fait plus de 400 000 morts en 2019, dont deux tiers d’enfants de moins de 5 ans. L’écrasante majorité des cas (94 % des 229 millions dans le monde) et des décès surviennent en Afrique, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Jusqu’à présent, l’efficacité des médicaments reste élevée, mais une surveillance accrue au Rwanda et dans les pays voisins s’impose, avertit l’étude, publiée dans The Lancet Infectious Diseases.
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La résistance aux médicaments est associée à des parasites porteurs de mutations d’un gène (pfk13). Certaines mutations avaient déjà été décelées au Rwanda, mais à une plus faible fréquence que dans la nouvelle étude et sans persistance démontrée du parasite chez les enfants soignés avec de l’artémisinine.
« Un signal d’avertissement inquiétant »
Introduits au début des années 2000, les traitements à base d’artémisinine combinée à un autre antipaludéen (CTA/ACT) sont actuellement les plus efficaces et les plus utilisés. La résistance à l’artémisinine a été identifiée pour la première fois au Cambodge en 2008. Dans la région du Mékong, la résistance au médicament associé a souvent suivi, entraînant l’échec du traitement combiné (CTA). « L’émergence d’une résistance partielle à l’artémisinine en Afrique est un signal d’avertissement indiquant que l’efficacité des CTA pourrait être compromise si une résistance au médicament qui lui est associé émerge », notent les chercheurs.
L’étude a porté sur 224 enfants de 6 mois à 5 ans infestés par le parasite, dans trois villes du Rwanda : ils ont été traités pendant trois jours par l’association thérapeutique la plus courante (artéméther-luméfantrine) puis surveillés durant un mois, avec des prélèvements sanguins hebdomadaires. Parmi les participants, environ 15 % dans deux sites étudiés avaient encore des parasites détectables trois jours après le traitement. « Des données récentes suggèrent que nous sommes au bord d’une résistance à l’artémisinine cliniquement significative en Afrique, comme cela s’est produit en Asie du Sud-Est il y a plus de dix ans », s’alarme dans le journal le professeur Philip Rosenthal (Université de Californie, San Francisco), qui n’a pas participé à l’étude.
Source : Le Monde avec AFP
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